Article collectif [publié en février 2001] (frères Meyer, Florent Wolff, Yann
Corby et Cyrille Suhr)
Il ne faut pas toujours brailler " Mort aux vaches !
". Elles se révèlent fort utiles lors des situations
bouffones auxquelles n'importe quel varappeur de
valeur est régulièrement confronté. Il n'y a rien de
dégradant à fréquenter les pédales ! Trop souvent, on
en réduisait l'usage aux situations extrêmes de
sauvetage, négligeant le confort inestimable qu'une
pédalade de qualité apporte dans un crux. Il est
certain que la pédale trouve ses origines dans les
situations chaudes, que ce soit dans les Vosges ou
avenue des Vosges.
1. Une situation classique:
Après moultes chutes, le grimpeur, lassé de pomper
pour atteindre la lèvre du surplomb, se voit dans
l'obligation de saisir sa pédale, pourtant honnie par
la foule. Les muscles raidis par l'effort consécutif à
ces va-et-vient sans fin, impuissants face à ce bombé
truffé de trous fuyants, notre grimpeur introduit cet
accessoire magique dans le mousqueton. Reste à prendre
son pied, pour le caler dans l'étrier, et dans un
ultime coup de rein, redresser son corps, pour
aggriper la prise si désirée.
2. Pédalade et enchaînement:
Nul n'est besoin d'être dans l'urgence pour recourir à
la pédale. Afin d'éviter une surchauffe précoce en
montant les paires, il est nécessaire de mettre à
nouveau le pied à l'étrier, dans le souci, bien
légitime, de conserver sa vigueur en vue des futurs
assauts. Tirer un bon coup (à la dégaine) ne suffit
pas toujours, il faut aussi pouvoir pousser.
3. La pédale, mode d'emploi:
N'oublions pas que la pédale n'est pas réservée à la
gente masculine, les fines demoiselles peuvent aussi
jouir de ses délices enivrants (les grosses aussi).
Oublions par contre cette pratique aussi félonne que
dangereuse qui consiste à se vacher au relais avec une
dégaine, ce qui prive le grimpeur d'une sangle sur son
pontet. Une fois de plus, les grimpeurs de résine, par
leur ignorance crasse des réalités du rocher, se
privent d'un moyen de secours et de réalisation. Bien
fait pour eux !
Règle n°1 : avoir une vache, pas trop encombrante, à
son pontet.
Règle n°2 : la longueur de la vache doit être choisie
avec circonspection. On doit pouvoir l'accrocher au
porte-matériel dorsal sans qu'elle gêne, ni la prise
de magnésie, ni le décrochage des dégaines (on prendra
soin de la placer sous ces dernières, ni, enfin et
surtout, la fluidité des ondulations corporelles (à
l'exception de la perfide lolotte qu'il est toujours
bon d'entraver). On en déduit cette formule empirique
:
Lv = 2/3 Pt
Où Lv est la longueur de la vache, et Pt le périmètre
de la taille (mesuré au niveau du nombril ou en
dessous).
Règle n°3 : si l'on prévoit un usage massif et subtil
de la pédale, il est pertinent de se munir de
plusieurs tailles d'étriers : la longueur classique
(50 cm environ) plus une vache courte de 25-30 cm.
Dans le besoin, on peut plier la longue en deux pour
en faire une courte. Ne surtout pas faire de noeuds
étant donné la fragilité de l'engin.
Règle n°4 : ne jamais oublier de placer une deuxième
dégaine, au mousqueton supérieur fin, dans le ring. On
pourra ainsi tirer sur la dégaine vers le haut pendant
qu'on pousse sur l'étrier vers le bas. Complexe et
euphorique mouvement d'opposition des forces.
Règle n°5 : veiller évidemment à ne pas tomber avec le
pied dans la pédale (risque de retournement,
assurément malencontreux si cela survient pendant
l'acte). Ainsi, dès la prise désirée attrapée, on
dégagera presto le pied de l'étrier pour le poser avec
délicatesse sur la bonne prise de pied que constitue
le ring (se méfier des spits, plus zippants, le must
en la matière étant le Bühler).
Attention : le respect de ces règles est impératif,
car la loi de la pesanteur est l'une des rares qu'un
grimpeur ne puisse enfreindre.
Outre le vélodrome et le parc de la Citadelle, le
royaume de la pédale est sans conteste le mur à légers
dévers. Pour les grosses inclinaisons, on préférera la
méthode dite de " la vache courte ", objet d'un futur
article.