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© Escalade Alsace
Yann Corby
DE L'ÉPARPILLEMENT DES MASSES


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Chronique québécoise par Jean-Pierre Banville





Alors que les grimpeurs du continent réapprennent les techniques de construction des igloos, les vannes célestes déversent des masses d'eau sur les Olympiques. On m'expédie des photos de Bastia sous la neige, on ne parle de courses en raquettes à travers l'Alsace, on me dénombre le nombre de disparus sous les avalanches près de Bergame. Même le Pape, assis en chien de fusil devant le grand foyer du Château St Anges, demande à son camerlingue d'aller pelleter l'entrée du Vatican!

Il n'y a que les grimpeurs de cascades qui sont souriants par les temps qui courent. Enfin, ceux qui grimpent à des altitudes modestes car le reste craint d'avoir à utiliser un Arva lors des sorties. Il y aurait même des possibilités de dry-tooling à Claret, glaçons et tout… enfin, si vous avez la chance de ne pas rencontrer les autochtones car ils ne verront pas d'un bon œil le contact du piolet sur leur rocher favori.

Pendant ce temps, de la pluie aux Olympiques! Mais rien de bien nouveau : j'ai vécu sur la Cote Ouest et il pleut toujours à Vancouver. Tout l'hiver. Le printemps, l'été et l'automne aussi d'ailleurs. Qu'on ait imaginé faire des compétitions extérieures sur le petit centre de ski en face de la ville relève du délire ou d'une ingestion massive d'un certain type de champignons qui poussent là-bas. Ou, mieux encore, d'un désir irrépressible de faire un paquet d'argent rapidement en vendant des condominiums et des services. Il y a Whistler qui aurait pu accueillir toutes les épreuves et qui souffre d'un surplus de neige dès qu'on en quitte le village pour monter en altitude.

C'est le réchauffement climatique?
Non, la météo habituelle de la cote ouest. A mon premier hiver à Tacoma, charmante petite ville au sud de Seattle, il a plu 95 jours d'affilée. Oui, vous avez bien lu : 95 jours et ceux qui doutent peuvent demander à Gère-Mène! J'écris ''ville'' mais j'aurais pu écrire ''vile'' considérant la violence et la pauvreté qu'on y a découvert. Au moins Seattle n'était pas loin : même pauvreté, un peu moins violent mais beaucoup plus ''culturel''.

Quel y est l'état de l'escalade?
Et bien, il y a des montagnes donc il y a beaucoup d'alpinistes. Ce sont majoritairement des volcans donc c'est un alpinisme ludique jusqu'à ce qu'arrive une tempête du Pacifique.
Là, ça tombe comme des mouches …

Les monts Rainier et Hood font beaucoup de victimes, le plus souvent des groupes de gens très, mais très, mal préparés. Au moment où j'écris, un gars est pris dans le cratère du mont St Helens, le volcan qui a explosé dans les années 80. Il est tombé dans le cratère du volcan! Où seraient les alpinistes américains sans leur téléphone cellulaire? Tous au ciel sans doute!

Le rocher y est pour le moins marginal : du basalte de toutes qualités. Des petites voies de Exit 38 jusqu'au site de Vantage, dans le désert central, avec ses rangées de colonnes de basalte toutes plus pourries les unes que les autres. Une de ces colonnes est tombée sur le célèbre alpiniste qui pédala de la Suède jusqu'à l'Everest il y a quelques années. Le basalte assassin…

Les grimpeurs? Tout ce qui n'est pas américain n'est pas digne d'exister, c'est clair. Je me suis fait détruire des voies équipées à Exit 38 et à Vantage mais aussi dans un autre petit site assez caché. J'ai monté des voies intérieures dans la salle d'escalade la plus belle de Seattle pour y retourner le lendemain et m'apercevoir qu'elles avaient disparues. Et, oui, j'avais la permission du management. Mais je suis un ''frog'' donc tous les coups sont permis!

Évitez l'État de Washington et allez directement vers Smith Rock, en Orégon… il faut savoir passer sans s'arrêter.

Plus chaud que le feu : vous vous souvenez des Pestes et de leur école, non?
Et bien la nouvelle de la semaine. L'école primaire de mes charmantes nièces vient maintenant d'interdire, dans la cour de récréation de l'école, les rassemblements de plus de 5 personnes!
Oui, vous avez bien lu : dans une cour d'école primaire, pas plus de cinq enfants ensemble. Cela dans une banlieue cossue au nord de la ville.
En Corée du Nord, oui… mais ici … on éparpille les masses? Les masses du primaire?

Je lis que Marc Batard, l'alpiniste bien connu, donnera une conférence à la fin mars. Le sujet?
"Échanges, réflexions sur le sens de la vie, sur le rôle que joue la mort dans la façon de conduire sa vie''

Étrange idée!
Qui pense à la mort de nos jours?
Au magasinage, oui; au forfait de son cellulaire, certainement; au sexe opposé, assurément… mais à la mort?
Devrions-nous y penser plus souvent? La mort devrait-elle jouer un rôle majeur dans notre vie?
On croyait autrefois qu'il était nécessaire de faire une ''belle'' mort. Et que cette ''belle'' mort était à préparer durant la vie donc elle devenait le reflet de la vie entière du macchabée.

Si on accepte de jouer un jeu, on en accepte les règles et les pénalités. Si vous descendez à cent kilomètres à l'heure sur la piste de descente de Whistler, vous acceptez qu'il puisse y avoir une sanction sévère et définitive en cas d'erreur.
En luge, à cent quarante km/hr, vous avez vu le résultat d'une maladresse!
On accepte, consciemment, les risques de l'activité. On les intègre. Et on n'y pense plus. Sans doute parce que nous n'avons plus à prendre en compte la notion de ''Salut'' de notre âme en vue d'un arrière monde.

Mais si l'on est conscient à temps plein et qu'on arrive à gérer le stress, il se peut que l'idée de la Mort nous donne un nouvel éclairage sur notre vie. Il est même possible que cette idée de mort devienne un incontournable qui rend la vie ordinaire très monotone au point où seul le contact avec le danger nous fasse sentir vivant.
Voir le film en nomination pour les Oscars : ''Démineurs'' (The Hurt Locker).

Il est possible aussi que cette proximité nous fasse prendre conscience de notre chance d'être en vie et de parcourir les montagnes et falaises de la Terre. C'est sans doute la piste de solution qui sera proposée lors de la conférence.

Je crois que nous sommes tous différents et que notre optique individuelle découle de nos expériences, de notre histoire.

J'aimerais bien être présent à cette rencontre : vous êtes chanceux de pouvoir y assister! Enfin quelque chose de différent…

Vous allez bien aimer, de la même façon, une vidéo de Urban Climbing tournée à Sondrio, en Italie. A voir sur Youtube.

Je connais Sondrio!
J'y ai pris une cuite à l'automne… non, pas réellement, mais j'ai dégusté là les meilleurs vins de la région en parcourant le village qui est charmant. J'ai quelques belles photos et je vous raconterai la semaine prochaine. Jamais je ne pouvais imaginer qu'on ferait de l'escalade sur les murs de la ville et surtout qu'ils seraient assez sobres, en février, pour pouvoir le faire! Quand j'ai quitté, la rivière elle-même semblait changer en vin.

Pour finir, rappelez vous que Eroscalade 2010 attend toujours vos manuscrits!
Nous avons reçu quelques histoires mais il en faut plein d'autres : impossible de croire que tous les grimpeurs qui écrivent des pages et des pages, quotidiennement, sur les forums d'escalade et de montagne ne peuvent taper 800 mots sur un sujet aussi engageant.
Expédiez vos opus à votre webmestre favori : le 15 mai arrive vite!





JPB






www.escalade-alsace.com