Le vrai luxe, c'est
l'espace et le temps.
Infinis tous les deux pour les enfants.
Mais le monde devient plus petit quand on grandit, et un
jour on jette, on débarrasse, on fait place nette.
Il vous est peut-être arrivé, à cette occasion, de tomber
par hasard sur d'anciens rouleaux de papier peint, soigneusement emballés. Au
fond d'un réduit, ils semblaient attendre patiemment l'éventualité d'un
hypothétique raccord.
En
vain.
Tous les murs sont rhabillés depuis longtemps. L'aveugle
cruauté du temps qui passe, inexorable, a
effacé de notre esprit la noble mais dérisoire intention de conserver
intact l'aspect des choses. Et ces lés inutiles sont comme des parchemins
oubliés qui indiquent pourtant l'emplacement d'un trésor.
Alors, sans se méfier, on en déroule vite fait un mètre
pour voir...et c'est le choc: Une marée
nous submerge, et du plus profond de notre mémoire jaillissent pèle-mêle
éclats de rire et poignées de mains, exploits d'un jour, senteurs subtiles du
ciel dans l'azur des pins. Étreintes passionnées... Bonheurs éphémères.
Ces sensations délicates qu'on croyait perdues semblent
liées par une étrange alchimie aux tons délavés des motifs désuets du papier
peint de notre jeunesse qui confèrent à la tapisserie la plus ordinaire
l'étonnante faculté de raviver le souvenir fugace d'émotions enfouies.
Comment?
Un bon peintre vous livrerait sans doute une partie du
secret. Le photographe, ignorant, se contente d'être au bon endroit au bon
moment.
Pour jouir de
l'espace et du temps.
Comme un enfant.
A Roc-Extrême aussi on est comme des enfants: On cherche
l'équilibre, on se fait peur pour se rassurer, on touche au gaz.
On est libre.
On vient de remettre la main sur le vieux papier peint.
Dès lors, le doux parfum délicieusement nostalgique des
premières heures du pan peut nous grimper en tête .