Arthur, champion du Grand Est 2025, enchaîne l’âme du phénix 8c

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Arthur dans le plafond de l'âme du Phénix

Arthur Giraud Bernardeau jeune grimpeur talentueux de Roc en Stock s’est récemment illustré par une série d’exploits remarquables : terminant champion du Grand Est, il réalisait, seulement trois jours plus tard, l’enchaînement de l’âme du Phénix (8c) au Kronthal. Il confie que jongler entre études et entraînements n’est pas toujours facile mais il sait établir ses priorités. Passionné d’escalade et plus encore de compétition, Arthur reflète le quotidien exigeant de cette nouvelle génération de grimpeurs/ étudiants déterminés.

Propos recueillis par Estelle Rocher.

 

À quelle fréquence t’entraînes-tu chaque semaine ?
J’ai un programme d’entraînement bien structuré, avec 10 séances par semaine. Cet entraînement peut varier en fonction de mon niveau de fatigue, ma forme physique, la présence de douleur, etc. Parmi ces 10 séances, certaines sont plus accès sur la grimpe, d’autres de muscu pure, une séance de course et d’autres séances spécialement conçues pour me permettre de travailler efficacement tout en évitant une accumulation excessive de fatigue ou les risques de blessure. Micky est celui qui gère tout, il me donne les entraînements et moi, je n’ai plus qu’à suivre les instructions sans poser de questions (rires). Il travaille vraiment pour que chaque entraînement soit adapté à ma situation.

Comment parviens-tu à concilier tes études avec ton entraînement d’escalade ?
Je t’avoue que c’est compliqué… L’année dernière, quand j’étais encore au lycée, tout se passait bien. Mais cette année en étude supérieure ça devient plus compliqué. J’essaye de trouver un équilibre, mais je me rends compte que le rythme est intense. Je ne peux pas réviser autant que ce que je voudrais par exemple. Pour l’instant, je privilégie mon entraînement à mes études.
La vie étudiante, on y renonce un peu, c’est un choix à faire. Pour ma part, ça ne me dérange pas trop de passer à côté de ces expériences. Allez en soirée, c’est sympa, mais le lendemain, à l’entraînement, on n’est pas au meilleur de sa forme. C’est un peu une perte de temps sur ton entraînement…

Tu privilégies les performances en exté’ ou te focalises-tu davantage sur les compétitions en salle ?
Moi je suis 100% compétiteur. La falaise ce n’est pas vraiment ma passion, j’ai du mal à y prendre du plaisir. Cela dit, c’est toujours sympa d’y aller avec les copains quand les conditions sont réunies. Mais moi clairement, mes objectifs ils sont en compétitions.

Est-ce tu stresses avant les compétitions ?
Ça a été très compliqué, j’ai accumulé quelques compétitions ratées à cause du stress, de la pression et de l’atmosphère oppressante qui règne en compétition. Depuis environ un an et demi, je travaille avec un préparateur mental pour apprendre à mieux gérer cette pression. On met l’accent sur l’acceptation du stress : reconnaître que c’est normal d’être stressé en compétition et qu’on ne peut pas totalement l’éliminer. L’idée est de comprendre comment faire en sorte que le stress n’impacte pas mon escalade et qu’il ne devienne pas un frein à ma performance.
Quand tu as fait tes preuves en compétition, y a toujours ce moment où les regards se tournent vers toi, on sait que tu es capable donc ça ajoute une pression. La compétition c’est fait pour te mettre la pression, c’est d’empêcher les grimpeurs de grimper correctement et parfois c’est difficile de passer outre de l’attente des autres ou de l’ambiance.

Et qu’est ce que tu fais concrètement pour gérer la pression ?
On a mis en place pas mal de chose avec le temps. Tu sais, on a tous nos petites routines, ces geste ou habitudes qu’on répète pour se préparer mentalement. Beaucoup de sportif fonctionnent comme ça. Nadal, par exemple, il a ses tics, ses rituels avant chaque match pour se concentrer.
Le principal travail qu’on a accompli, c’est l’acceptation du stress. Parfois on se croit rassuré alors qu’en réalité, on est tendu au fond de soi. L’objectif était donc d’accepter ce stress, de ne pas lutter contre lui, et d’apprendre à grimper avec.

Comment as-tu vécu les championnats du Grand Est dans ta catégorie ?
C’était bien. Je suis arrivé détendu, en sachant que j’étais en forme. Et puis ce sont les compétitions de formalité, celles qu’on doit obligatoirement faire pour accéder à l’étape suivante, mais qui ne sont pas fondamentales compliquées et stressantes. En U20, j’étais qualifié d’office pour les championnats de France, donc peu importe le résultat. En revanche en catégorie senior, je n’étais pas pré-qualifié, donc je devais gagner ma place.
Ça m’a fait plaisir de grimper à Roc en Stock, ça faisait un moment qu’il n’y avait pas eu de compétition. On a eu le droit à un belle assortiment de prises pour les voies. Et puis ce sont des voies de compétition, c’est toujours agréable à grimper. Je suis retournée à Roc en Stock récemment pour essayer les autres voies de la compétition que je n’avais pas eu l’occasion de grimper. J’ai particulièrement apprécié notre voie de finale, dans le plafond. Celle des U16 hommes et vétérans hommes étaient un peu plus accessibles, mais super classe aussi, avec des prises toutes neuves que je ne connaissais pas, des Flatholds, Kilter et Urban plastic.

Trois jours après tu as fait l’Âme du phénix (8c au Kronthal), depuis combien de temps tu t’entraînais ? 
Je ne me suis pas entraîné spécifiquement pour cette voie. C’est grâce à mon programme d’entraînement pour les compétitions que j’ai pu progresser physiquement et techniquement. Pour l’Âme du Phénix, j’ai mis 9 essais. L’été dernier, juste après avoir enchaîné Traité de Déversification (8a au Brotsch) on a décidé, avec Coco (Corentin Nuss), de tester cette voie pour s’amuser. Deux mois plus tard, j’y suis retourné et, après quelques essais, j’ai vu que j’avançais vraiment bien. Alors, dès que la météo s’est améliorée, on est retournés en falaise, et cette fois, ça l’a fait. Grâce à l’entraînement, j’ai continué à progresser, et c’était logique qu’à un moment j’arrive à l’enchaîner.
Depuis mes 16-17 ans, je dirai que ma progression est constante. Quand j’ai essayé l’Âme du Phénix pour la première fois, je n’avais pas encore le niveau. Mais aujourd’hui, avec tout le travail et tout ce que Micky me fait endurer (rire), c’est arrivé assez naturellement.

Quels sont tes futurs projets ?
Valider ma L1 (rires) mais rien n’est sûr pour l’instant. Avec les entraînements, c’est vraiment compliqué de tout concilier. Si j’arrivais à éviter de redoubler, ce serait déjà une belle réussite. On m’avait prévenu avant d’intégrer la fac de psycho que ce serait intense, mais je ne m’attendais pas à ce que ce soit à ce point exigeant.
Et côté compétitions, mon objectif est clair : aller le plus loin possible.